Guide pratique : Syndrome de Stickler

Qu'est-ce que le syndrome de Stickler ?

Guide rédigé par Dr Patricia BLANCHET, Pr Pierre SARDA,   centre de référence Anomalies du Développement CHU MONTPELLIER

Dernière mise à jour janvier 2017


 

Le syndrome de Stickler, aussi appelé syndrome de Marshall-Stickler est une maladie génétique héréditaire avec une incidence de 1/7000 à 1/9000 naissances. Cette pathologie est principalement caractérisée par une atteinte osseuse entrainant un retard de croissance, des atteintes ophtalmologiques, auditives et des malformations du palais (fente palatine). Il s’agit d’une affection très variable cliniquement conduisant à un retentissement variable sur la vie quotidienne des personnes atteintes.

Origine du syndrome

Ce syndrome est dû à des mutations situées sur certains gènes. Il existe 6 gènes identifiés et mis en cause dans la maladie à l’heure actuelle. Ces gènes sont COL2A1, COL9A1, COL9A2, COL9A3, COL11A1 et COL11A2 situés sur des chromosomes différents. Ils permettent la........

fabrication de protéines, les collagènes II, IX et XI, essentielles dans l’élaboration des tissus de l’organisme. Il existe actuellement 6 types de syndromes de Stickler en fonction de l’anomalie génétique responsable de la maladie. Le type 1 est le plus fréquent et correspond à 80% des cas. Il est dû à des mutations dans le gène du collagène COL2A1. Environ 10 à 15%, sont liés à des mutations du collagène COL11A1 (type 2). Les autres types sont plus rares : type 3 (COL11A2), type 4 (COL9A1), type 5 (COL9A2) et type 6 (COL9A3).

Il existe plusieurs modes de transmission de ces mutations. 
La plus fréquente est autosomique dominante (90% des cas). Cette hérédité est retrouvée pour les types 1, 2 et 3 de la maladie. Ce qui veut dire que si l’un des deux parents est atteint de la maladie il pourra la transmettre à 50% de ses enfants, quel que soit le sexe de l’enfant. Dans certaines situations, la mutation est non héritée (aucun des 2 parents n’est atteint). On parle alors de néo-mutation sur les gènes codant pour les collagènes. 
Les types 4, 5 et 6 se transmettent sur le mode autosomique récessif. Dans ce mode d’hérédité, les parents sont porteurs d’une mutation sur un de leurs deux gènes de collagène mais ne sont pas malades. L’expression d’un seul gène muté n’est pas assez forte pour entrainer la maladie. Cependant si chacun des deux parents donne à un enfant leur gène muté, cet enfant ayant hérité de deux gènes mutés sera obligatoirement malade. Les enfants qui auront hérité soit d’un seul gène muté soit d’aucun gène muté seront obligatoirement non malades.

Conséquences de la maladie

Les patients atteints du syndrome de Stickler peuvent avoir plusieurs pathologies 

  • Un retard de croissance le plus souvent de début postnatal mais parfois de début anténatal. Sur le plan radiologique, les patients présentent une dysplasie spondyloépiphysaire associant une platyspondylie et une dysplasie épiphysaire de degré variable. Il existe de ce fait une extrême variabilité inter et intra familiale de la croissance ne permettant pas de prévoir un pronostic final de taille. Il existe également une hyperlaxité articulaire et une prédisposition à l’arthrose précoce.
  • Les manifestations craniofaciales observées dans ce syndrome sont une hypoplasie de l’étage moyen, une protusion des yeux, une hypoplasie des os propre du nez, un microrétrognathisme et parfois une fente palatine. La fente palatine est présente chez 60 % des personnes portant la mutation sur le gène COL2A1.
  • Sur le plan ophtalmologique, les patients présentent une myopie congénitale modérée à sévère souvent non évolutive. Des anomalies du vitré et une cataracte congénitale peuvent également être observées. La gravité de l’atteinte ophtalmologique est liée au risque important de décollement de rétine qui est corrélé au degré de myopie du patient.
  • Sur le plan auditif, les patients porteurs de ce syndrome peuvent présenter une surdité d’apparition progressive et qui n’est que très rarement congénitale. Le plus souvent, il s’agit d’une surdité de perception. Le déficit auditif peut être également mixte avec une surdité de transmission due à des problèmes d’otites liés au dysfonctionnement palatin ou à l’anomalie des osselets.
  • D’autres anomalies sont décrites, telles qu’une atteinte cardiaque à type de prolapsus mitral ou de crises de tachycardies transitoires. 
  • Le diagnostic de syndrome de Stickler peut se faire en période anténatale. Le fœtus peut présenter des anomalies qui font penser à ce diagnostic sur les échographies. Cependant, le diagnostic sera le plus souvent évoqué à la naissance ou plus tard chez un enfant ou même découvert tardivement à l’âge adulte du fait de la très grande variabilité clinique.
  • Dans le cadre d’une demande de conseil génétique une étude de génétique moléculaire peut être réalisée. Il lui sera proposé un diagnostic prénatal ou préimplantatoire après acceptation de l’indication par le Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal (CPDP) pour la personne qui ne souhaite pas avoir un enfant atteint de la même maladie.

Au moment du diagnostic l’examen cherche à faire le point des problèmes médicaux qu’il faut prendre en charge.

Les conséquences de l’altération de la fonction des collagènes II, IX XI, sont en grande partie connues. Certaines peuvent être traitées (médicalement ou chirurgicalement) mais d’autres nécessitent une prise en charge précoce telles que pour les difficultés de langage consécutives aux troubles auditifs et les malformations du palais. Enfin certaines apparaitront avec le temps et il sera alors très important d’en surveiller l’apparition pour les prendre en charge le plus vite possible pour en diminuer la gravité.

Suivi médical par le pédiatre / médecin généraliste

Bilan des malformations congénitales

Rechercher des anomalies oculaires et demander un avis chez un ophtalmologue. Le suivi ophtalmologique est fondamental dans cette maladie.Dépister des troubles .......

auditifs dès la naissance et rechercher des malformations de l’oreille interne et moyenne. Faire un suivi ORL régulier la première année de vie.

  • Rechercher des malformations cranio-faciales : fente palatine…
  • Rechercher un retard de croissance et vérifier si une pathologie osseuse est présente, par la réalisation d’une radiographie du corps entier avec une bonne visualisation du rachis et des articulations.
  • Compléter le bilan par la réalisation d’une échographie cardiaque, abdominale, rénale, cérébrale.
  • Bilan des anomalies biologiques
  • Etude en génétique moléculaire avec recherche spécifique des mutations dans les gènes connus pour être impliqués dans la maladie. L’étude génétique peut aussi être étendue si nécessaire aux 2 parents.
  • Numération formule sanguine avec numération plaquettaire.
  • Bilan phosphocalcique.Toute anomalie mise en évidence lors du bilan initial doit être prise en charge par l’équipe médicale spécialisée.
  • La surveillance générale sera programmée par le pédiatre puis par le médecin de famille avec la famille en fonction des problèmes médicaux rencontrés.
  • Les enfants avec un syndrome de Stickler ont des difficultés très spécifiques, en particulier auditives et visuelles, qui peuvent entrainer des troubles du langage, et d’autres difficultés qui peuvent perturber le développement psychomoteur. Chacune de ces particularités doit être repérée et prise en charge précocement de manière spécifique afin d’offrir la meilleure qualité de vie à l’enfant et au futur adulte atteint du syndrome de Stickler.

Il est recommandé de ne pas pratiquer d’activités sportives qui comportent des risques de traumatisme oculaire ou articulaire. Cependant les activités physiques d’entretien sont fortement recommandées.

Suivi médical de 0 à 5 ans

A télécharger Fiche de suivi médical 0 à 5 ans 

  • Consultations pédiatriques régulières aux dates fixées par le pédiatre.
  • Croissance staturale et pondérale. Alimentation : recherche de
  • troubles de la déglutition, de dysphagie, de reflux gastro-œsophagien, d’apnées obstructives, constipation. Une consultation avec un gastro pédiatre serait nécessaire si un de ces troubles était rencontré.
  • Examen neurologique.
  • Examen orthopédique (laxité articulaire, statique vertébrale : scoliose).
  • Consultations d’ophtalmologie avec un suivi spécifique chaque année en fonction des pathologies retrouvées (cataracte congénitale, décollement de rétine …).
  • Surveillance des pathologies ORL (otites) et vélaires (voile du palais court ou hypotonique). Les consultations avec un médecin ORL doivent être répétées tous les 6 mois pendant les premières années de vie.
  • Développement psychomoteur, s’assurer que la famille est en lien avec les équipes de prise en charge médico-éducatives et sociales et psychologiques : CAMSP, CMP, intervenants en libéral (orthophonistes, psychomotriciens, ergothérapeute, …), MDPH ou autres.
  • Surveillance du développement du langage et prise en charge spécifique (médicale et orthophonique).
  • Examen et soins dentaires (possible malocclusion dentaire nécessitant des soins orthodontiques).
  • Vaccinations habituelles.
  • Autres consultations de médecin spécialiste en fonction des pathologies existantes (chirurgie pédiatrique du palais, cardiologie, immunologie, endocrinologie, néphrologie…). Aide par psychologue si besoin.

Examens complémentaires

Bilan auditif et ophtalmologique. Radiographies du rachis et des grosses articulations. Examen dentaire.
Surveillance clinique : croissance, alimentation, troubles de la déglutition, vision, audition, OPH, infections ORL, troubles phonatoires et du langage, anomalies cardiaques, apnées du sommeil.

Suivi médical de 5 à 12 ans

A télécharger:  Fiche de suivi médical de 5 à 12 ans 

De 5 ans à 12 ans

  • Consultations médicales régulières avec croissance staturale et pondérale (IMC pour éviter le surpoids pour .......

diminuer les contraintes articulaires), surveillance du développement du langage et prise en charge spécifique (médicale et orthophonique). Examen neurologique. Examen orthopédique (articulations, statique vertébrale : scoliose).

  • Consultations d’ophtalmologie chaque année. Les atteintes sévères de la rétine apparaissent souvent à partir de 10 ans. Orthoptie. 
  • Surveillance des pathologies ORL et de l’audition (consultations annuelles).
  • Examen et soins dentaires, orthodontie.
  • Aide psychologique si besoin.
  • Vaccinations habituelles.
  • Autres consultations de médecin spécialiste en fonction des pathologies existantes (chirurgie pédiatrique du palais, orthopédie pédiatrique, cardiologie…).
  • S’assurer de la bonne prise en charge de la famille par les structures spécialisées (CAMSP, SESSAD, MDPH…) et d’une bonne intégration scolaire.

Examens complémentaires

Bilan hématologique. Examen OPH, ORL, audition. Radiographies squelette.
Surveillance clinique : poids, troubles de la déglutition, ophtalmologie, audition, infections ORL et respiratoires, troubles de l’acquisition du langage, anomalies cardiaques, orthopédie.

Suivi médical de 12 à 18 ans

 A télécharger: Fiche de suivi 12 ans à 18 ans 

  •  Consultations médicales régulières. Croissance staturale et pondérale, IMC (attention au surpoids). Surveillance du langage et prise en charge spécifique (médicale et orthophonique). Examen neurologique. Surveillance des ......

 

problèmes orthopédiques (statique vertébrale).

  • Surveillance ophtalmologique chaque année. Orthoptie. Les atteintes sévères de la rétine apparaissent souvent entre 10 et 30 ans.
  • Surveillance des pathologies ORL et vélaires.
  • Examen et soins dentaires, orthodontie.
  • Vaccinations habituelles.
  • Consultation avec un professionnel spécialisé dans l’adolescence, psychologue, infirmière scolaire ou un gynécologue spécialisé.
  • Autres consultations de spécialiste en fonction des pathologies existantes (ORL, cardiologie, neurologie, psychologue).
  • S’assurer que la famille ou la personne est en lien avec les équipes de prise en charge médico-éducative, sociale et psychologique : CMP, CMPP, SESSAD, intervenants en libéral si scolarité en milieu ordinaire, IME, MDPH….) Scolarité.

Examens complémentaires

Bilan hématologique. Radiographies du squelette. Audition, OPH.
Surveillance clinique : alimentation, poids, audition, ORL, ophtalmologie, troubles du langage, acquisitions scolaires, orthopédie.

Suivi médical à l'âge adulte

 

Consultations médicales régulières ; examen clinique physique. Chez l’adulte, l’hyperlaxité tend à .........

à disparaître pour laisser la place à des raideurs articulaires, une arthrose et des douleurs. Une prévention de ces pathologies doit être mise en place précocement. 

  • Consultations d’ophtalmologie.
  • Surveillance de l’audition. Un déficit auditif sévère peut apparaître à partir de 40 ans.
  • Surveillance des risques particuliers : apnées du sommeil.
  • Consultations ORL.
  • Soins dentaires.
  • Consultation avec gynécologue spécialisé pour les femmes.
  • Autres consultations de spécialiste en fonction des pathologies existantes (cardiologie …)

Examens complémentaires

Radiographies du rachis et des articulations, si besoin. OPH, ORL.

Surveillance clinique : ophtalmologie, audition, apnées du sommeil, gynécologie, intégration sociale et professionnelle.

 

Scolarisation

Qu elles sont les conséquences de la maladie sur la scolarité ? Les enfants qui n’ont pas de déficit auditif et/ou visuel peuvent suivre une scolarité quasi normale.

Les absences résultant des multiples consultations spécialisées, les traitements et les interventions chirurgicales peuvent compliquer la scolarité : des structures telles que les Services d'assistance pédagogique à domicile (Sapad) permettent la continuité de la scolarité

Le regard des autres enfants sur la différence physique peut être difficile à accepter surtout à l’adolescence. Ces difficultés sont majorées lorsque le port d’une canule de trachéotomie est nécessaire (voir « Quelles sont les modalités de prise en charge des manifestations du syndrome ? »). Toutes les écoles n’acceptent pas un enfant porteur d’une canule de trachéotomie même fermée le jour, d’où la nécessité pour les parents de rechercher la structure adaptée

En cas de déficit visuel, les enseignants doivent être tenus informés des moyens auxiliaires (appareil de lecture, ordinateur adapté, loupes, lunettes,…) dont l’élève est équipé et des conditions nécessaires pour une exploitation maximale de son potentiel visuel (éclairages, contraste, couleurs,…). Le soutien d’Accompagnant d’Elèves en Situation de Handicap – AESH (ex Auxiliaire de Vie Scolaire - AVS) peut s’avérer nécessaire. Lorsque le déficit visuel s’aggrave, il est important d’apprendre un mode de communication non visuel ou tactile (par le toucher) comme l’écriture tactile, la Langue des Signes Tactile (LST), le Braille, et dans ce cas une scolarisation en milieu spécialisé est nécessaire.

En cas de gêne auditive, il est important de tenir les enseignants informés du comportement à adopter et des mesures d’accompagnement nécessaires : placer l’enfant au premier rang, l’aider à manipuler son appareil auditif, utiliser les microphones haute fréquence,... Lorsque le déficit auditif est plus important, les élèves peuvent être scolarisés soit temporairement en milieu spécialisé pour enfants déficients auditifs, soit dans une Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire-ULIS (avec moins d’élèves et un enseignement aménagé pour les enfants malentendants), soit en milieu ordinaire avec l’aide d’un éducateur si besoin. Dans ce dernier cas, le suivi par un professionnel spécialisé est nécessaire. Ces choix nécessitent que les parents et l’enfant, en âge de comprendre, aient accès à toutes les informations nécessaires pour éclairer leurs décisions.

Ou effectuer les suivis hospitaliers ?

Centre de référence des anomalies du développement et syndromes malformatifs : pour le diagnostic et la coordination des prises en charge à tout âge de la vie

CHU MONTPELLIER

Hôpital Arnaud de Villeneuve Département de génétique médicale

Pr David GENEVIEVE

371, avenue Doyen Gaston Giraud
34295 Montpellier cedex 5
04 67 33 65 64

Cardiopédiatrie

CHU MONTPELLIER Hôpital Arnaud de Villeneuve

Département de Pédiatrie (Pôle Enfant)

371, avenue Doyen Gaston Giraud
34295 Montpellier cedex 5
04 67 33 66 43

Chirurgie orthopédique et plastique infantile : pour les malformations du palais et les problèmes orthopédiques

CHU MONTPELLIER Hôpital Lapeyronie

Département de chirurgie infantile (Pôle Enfant)

371, avenue doyen Gaston Giraud
34295 Montpellier cedex 5
04 67 33 87 65

Ophtalmologie pédiatrique

CHU MONTPELLIER Hôpital Gui de Chauliac

Département d’ophtalmologie

80, avenue Augustin Fliche
34295 Montpellier cedex 5
04 67 33 71 68

ORL pédiatrique : pour la surveillance des infections ORL et des troubles de l’audition

CHU MONTPELLIER Hôpital Gui de Chauliac

Département ORL et chirurgie cervico-faciale (Pôle Neurosciences Tête et Cou)

80, avenue Augustin Fliche
34295 MONTPELLIER cedex5
04 67 33 68 04