Devenir adulte et entrer dans la majorité suscite beaucoup d’interrogations lorsque l’on se trouve en situation de handicap. L’autorité parentale va cesser mais la personne est-elle en capacité d’être responsable de ses actes et de gérer seule ses droits, sa santé, son quotidien, son budget ?
Il peut alors devenir nécessaire de penser à une mesure de protection afin de protéger la personne concernée et ses intérêts. Mais qu’est-ce qu’une mesure de protection et laquelle sera la plus adaptée ? Est-ce que la personne conserve des droits ? Quelles sont les démarches à réaliser pour faire une demande de mise sous protection ?
Le dispositif de protection juridique rénové avec la loi n°2007-308 du 5 mars 2007 se compose de différentes mesures. L’étendue de la protection de la personne va dépendre de ses facultés (situation personnelle, degré de handicap…).
Les mesures peuvent être d’ordre juridique comme la tutelle, la curatelle, la sauvegarde de justice, ou relever d’un dispositif d’accompagnement social.
Depuis 2016 avec l’ordonnance n°2015-1288 du 15 octobre 2015 portant simplification et modernisation du droit de la famille, un nouveau dispositif a été mis en place. Il s’agit de l’habilitation familiale qui peut s’avérer plus souple que les autres mesures.
Enfin lorsque l’on est atteint d’une pathologie évolutive, il est possible d’anticiper sa protection avec le mandat de protection future.
Les règles applicables aux mesures de protection ont été modifiées par la loi du 23 mars 2019
de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice. Les nouvelles dispositions viennent renforcer l’autonomie des majeurs protégés.
Les mesures de protection sont dites judiciaires, car elles nécessitent une décision du juge des contentieux de la protection (ex-juge des tutelles) du tribunal (judiciaire ou de proximité) dont dépend le lieu de résidence du majeur à protéger.
En fonction de la mesure choisie par le juge, les droits de la personne peuvent être plus ou moins limités. Le cadre législatif encadrant la protection des personnes vulnérables affirme le respect de l’autonomie des personnes.
Le juge étudiera par ailleurs si d’autres dispositifs ne sont pas suffisants : devoir de secours, d’assistance, procuration, mandat de protection future… La mesure doit être la moins contraignante possible et être exercée en priorité par la famille.
Le juge peut également nommer un mandataire judiciaire tiers si aucun membre de la famille n’est en mesure d’exercer le mandat de protection.
Une mesure de protection en plus de protéger la personne et ses intérêts permet de définir un cadre légal d’intervention.
Une rencontre est organisée au Tribunal avec la personne concernée (lorsque son état le permet) et ses proches.
Après examen du certificat médical établi par un médecin agréé par le Procureur de la République, le juge des contentieux de la protection statuera sur la mesure la plus adaptée.
Afin de respecter les droits et libertés des personnes, le juge des tutelles suivra trois principes essentiels avant de se prononcer :
Principe de nécessité :
Une mesure de protection n’est appliquée que si la situation le justifie et que si les facultés mentales et/ou corporelles de la personne à protéger sont effectivement altérées.
Principe de subsidiarité :
Si aucune autre solution ne peut être envisagée pour protéger la personne.
Principe de proportionnalité :
Le juge évalue la mesure la plus adaptée aux capacités de la personne.
Prononcées pour une durée de 5 ans maximum, les mesures de protection sont renouvelables et révisables à tout moment.
Créée par l’ordonnance du 15 octobre 2015, l’habilitation familiale est un dispositif récent de protection. Elle s’avère plus souple au quotidien que la tutelle ou la curatelle. Elle nécessite toutefois une décision du juge et relève d’un consensus familial. Une fois la personne désignée pour recevoir l'habilitation familiale (mandat familial), le juge n'intervient plus contrairement à la sauvegarde de justice, à la tutelle ou à la curatelle.
La loi du 23 mars 2019 vient faciliter le recours à l’habilitation familiale en créant pour le juge des passerelles entre les mesures de protection et l’habilitation familiale. Le dispositif d’habilitation familiale a aussi été élargi aux mesures d’assistance.
La sauvegarde de justice est une mesure de protection juridique de courte durée qui permet à un majeur d'être représenté pour accomplir certains actes.
Cette mesure peut éviter de prononcer une tutelle ou une curatelle, plus contraignantes. Le majeur conserve l'exercice de ses droits, sauf exception.
Il existe 2 types de mesures de sauvegarde de justice, judiciaire ou médicale.
La curatelle est une mesure d’assistance destinée à protéger un majeur qui, sans être hors d’état d’agir lui-même, a besoin d’être conseillé ou contrôlé dans certains actes de la vie civile. La curatelle n'est prononcée que si la mesure de sauvegarde de justice s’avère insuffisante.
Le curateur assiste la personne dans la réalisation de certaines démarches, mais il n’intervient pas seul ni à la place de la personne protégée (sauf exceptions prévues par le juge).
La personne sous curatelle doit obtenir l’accord de son curateur pour certains actes engageant ses biens et pour certains actes engageant sa personne.
Il existe plusieurs degrés de curatelle selon la situation de la personne : simple, renforcée ou aménagée. Le juge des contentieux de la protection peut désigner un ou plusieurs curateurs.
La tutelle est une mesure de protection judiciaire pour la personne dont l’altération des facultés nécessite d’être représentée de manière continue dans tous les actes de la vie civile. C’est une mesure plus large que la curatelle et la sauvegarde de justice. Toutefois, le juge peut énumérer, à tout moment, les actes que la personne peut faire seule ou non, au cas par cas. Le majeur placé en tutelle doit être protégé tant au niveau de sa personne que de ses biens.
Pour solliciter une mesure de protection (tutelle, curatelle ou sauvegarde), il est nécessaire d’adresser une requête au juge des contentieux de la protection (ex-juge des tutelles) du tribunal judicaire/de proximité du lieu de résidence de la personne à protéger.
LA REQUÊTE DOIT SE COMPOSER OBLIGATOIREMENT :
Le juge désigne les tuteurs ou curateurs en priorité parmi les membres de la famille. Être nommé officiellement tuteur ou curateur de son proche permet d’agir légitimement. Mais il existe des obligations administratives à respecter qui vont dépendre du type de mesure. Dans tous les cas, le tuteur/curateur doit prévenir les organismes administratifs de la mise en place de la mesure de protection. Il doit aussi rendre compte de l'exécution de leur mandat à la personne protégée et au juge.
Une personne sous-mesure de protection conserve des droits. Ces droits ont été renforcés avec la Loi du 5 mars 2007 et réaffirmés avec la loi du 23 mars 2019. Ils sont inscrits au sein du code de l’action sociale et des familles avec la déclinaison d’une charte des droits et des libertés et d’une notice d’information.
Au sein du Code Civil, l’autonomie des personnes protégées est renforcée : principe d’information, d’adhésion et de consentement de la personne, liberté du choix de résidence, …
La loi du 23 mars 2019 replace la personne protégée dans son rôle de citoyen avec le droit vote, de mariage. Ces nouvelles dispositions déplacent le contrôle à la surveillance du tuteur/curateur. Le majeur n’est plus en principe empêcher d’exercer son droit. En cas de désaccord, le juge peut être saisi.
Guide FALC pour mieux comprendre la protection juridique
Le mandat de protection future permet d’anticiper sur son avenir et d’organiser à l’avance sa protection ou celle d’un enfant en situation de handicap. Le mandat est un contrat qui permet au mandataire choisi d’agir dans l’intérêt de la personne lorsque ses capacités physiques ou mentales seront affectées.
La loi du 23 mars 2019 a repensé la place du mandat. Il s’agit de la 1ère mesure de protection pour la personne.
Les mesures d’accompagnement ont été mises en place avec la loi du 5 mars 2007. Contrairement aux mesures de protection juridique, elles ont pour objectif d’aider des personnes majeures dont les facultés ne sont pas altérées, mais qui rencontrent d’importantes difficultés et qui perçoivent des prestations sociales (Allocations familiales, AAH…).
Il existe deux types de mesure qui se complètent dans le cadre d’un dispositif d’accompagnement social et budgétaire gradué :
Placées sous l’autorité du président du tribunal judiciaire et du procureur de la République, les Maisons de Justice et du Droit (MJD) assurent une présence de proximité.
Les maisons de la justice et du droit sont des lieux d’accueil, d’écoute, d’orientation et d’information gratuite et confidentielle sur les droits :
Les Points d’Accès aux Droits (PAD) ont des missions similaires au MJD. Ils ne sont pas des établissements judiciaires de proximité. Les PAD sont des lieux d’accueil gratuits permettant d’apporter une information de proximité aux personnes ayant des problèmes juridiques ou administratifs.
Représenté par les délégués départementaux, c'est une institution indépendante de l'État, peut être sollicitée pour la défense et l’égalité de tous dans l’accès aux droits.